Macron humilie publiquement le chef d'état major des armées
Le général Pierre de Villiers ne décolère pas après le train d'économies imposé à la défense. Il a été auditionné devant la commission de la Défense au Palais-Bourbon, et a tapé du poing sur la table, expliquant à qui voulait l'entendre que l'armée avait "tout donné" et jugeant que la situation n'est "pas tenable". "Je ne vais pas me faire baiser comme cela", a-t-il ajouté, selon plusieurs participants cités par l'Agence France-Presse.
Devant les élus, le général connu pour son franc-parler a argué du fait que, faute de moyens, l'armée française devait régulièrement annuler des opérations après parfois des mois de recherche sur le terrain.
"C'est tout à fait exceptionnel qu'un chef d'état-major dise des choses pareilles", a déclaré Jean-Christophe Lagarde, précisant que le général avait été applaudi après son intervention, "sur tous les bancs". Le général a appelé à un effort sensible et rapide au plan budgétaire, disant en substance que l'objectif, fixé par Emmanuel Macron, d'atteindre "2 % du PIB en 2025, c'est sympa, mais qu'il faut agir dès 2017 et 2018", a rapporté Jean-Christophe Lagarde.
Le gouvernement Philippe a détaillé les mesures d'économies mercredi 12 juillet au moment même où le général de Villiers était officiellement reconduit dans ses fonctions pour un an. Les armées vont devoir assumer en 2017 le surcoût des opérations extérieures soit 850 millions d'euros,
Un coup d'autant plus rude que ces 850 millions représentent 20 % de toutes les coupes qui devront être réalisées par l'ensemble du gouvernement pour ramener le déficit des comptes publics sous la barre des 3 %.
Le président Emmanuel Macron a porté une violente charge, jeudi 13 juillet, contre les critiques émises en interne sur le budget des armées et réaffirmé ses engagements en la matière en promettant une hausse "dès 2018" de l'effort de Défense.
"Je considère pour ma part qu'il n'est pas digne d'étaler des débats sur la place publique. J'ai pris des engagements, je suis votre chef. Les engagements que je prends devant les concitoyens, devant les armées, je sais les tenir et je n'ai à cet égard besoin de nulle pression, de nul commentaire" a lancé à la veille du 14 juillet, le chef de l'État, devant la communauté militaire dans une allusion transparente au chef d'état-major des armées, le général de Pierre de Villiers.
Alors que Pierre de Villiers ne s'est exprimé que devant la représentation nationale, dans un cadre parfaitement légal et en se tenant à son rôle. Il a exprimé son mécontentement et n'a jamais remis en cause la légitimité du politique, jamais critiqué le chef de l'État, chef des armées.
Emmanuel Macron a rajouté : "J'aime le sens du devoir, j'aime le sens de la réserve qui a tenu nos armées là où elles sont aujourd'hui. Et ce que j'ai parfois du mal à considérer dans certains secteurs, je l'admets encore moins quand il s'agit des armées. De mauvaises habitudes ont parfois été prises sur ces sujets considérant qu'il devait en aller des armées aujourd'hui comme il en va de nombreux autres secteurs. Je le regrette."
En 2014, Pierre de Villiers avait mis sa démission dans la balance, avec les chefs d'état-major des trois armées (air, terre et mer), devant la perspective de coupes budgétaires.
Le Ministre de la Défense à l'époque, Jean-Yves Le Drian avait alors pris fait et cause pour ses troupes.
Malgré leurs divergences, Emmanuel Macron et le général Pierre de Villiers sont côte à côte pour descendre les Champs Élysées.
"Durant le défilé vendredi 14-Juillet, certains militaires nous disaient qu'ils considéraient qu'Emmanuel Macron avait publiquement humilié son chef d'état-major. Emmanuel Macron assume lui, ce qu'il considère être un acte d'autorité. Il applique en quelque sorte la règle édictée pour les ministres. Oui à la discussion, voire à la contestation, mais seulement en interne, jamais en public", a expliqué Maryse Burgot, journaliste à France 2.
Le général Pierre de Villiers peut "bien entendu" rester dans ses fonctions de chef d'état major de l'armée, a déclaré vendredi 14 juillet Edouard Philippe, malgré le sévère recadrage jeudi soir par Emmanuel Macron sur fond de tensions budgétaires avec les Armées. M. de Villiers peut-il rester en fonction? "Bien entendu. Vous savez, un message, quand il est exprimé par un chef, est formulé de façon forte et claire et il est reçu", a répondu le Premier ministre sur BFMTV, après le défilé militaire du 14 juillet sur les Champs-Elysées.
"Je comprends tous les débats, toutes les interrogations, toutes les discussions, mais s'agissant des armées, et s'agissant du chef des armées, quand une consigne est donnée, elle est tenue", a également déclaré Edouard Philippe.
Quelques heures seulement après avoir été recadré publiquement par Emmanuel Macron, le chef d’état-major des armées Pierre de Villiers a laissé un message ambigu sur sa page Facebook officielle "lettres à un jeune engagé".
Pierre de Villiers y tient, sur le thème de la confiance, des propos qui semblent évoquer ses liens avec Emmanuel Macron, chef des armées :
"Méfiez-vous de la confiance aveugle ; qu'on vous l'accorde ou que vous l'accordiez", écrit-il. "Elle est marquée du sceau de la facilité. Parce que tout le monde a ses insuffisances, personne ne mérite d'être aveuglément suivi. La confiance est une vertu vivante. Elle a besoin de gages. Elle doit être nourrie jour après jour, pour faire naître l'obéissance active, là où l'adhésion l'emporte sur la contrainte".
Le président de la République lui a répondu de façon cinglante dans les colonnes du JDD :
"La République ne marche pas comme cela. Si quelque chose oppose le chef d'état-major des armées au président de la République, le chef d'état major des armées change", a déclaré Emmanuel Macron.
Le président de la République rappelle qu'il a reconduit le général de Villiers, 61 ans, dans ses fonctions le 1er juillet pour une dernière année : "Il a donc toute ma confiance" à condition de "savoir quelle est la chaîne hiérarchique et comment elle fonctionne, dans la République comme dans l'armée".
Selon l'agenda du chef de l'État communiqué samedi par l'Elysée. Le général de Villiers sera reçu vendredi à 18 heures à l'Elysée par le président de la République. Aucune précision sur l'objet de cette rencontre n'a été donnée.
Ce qui m'a toujours frappé dans cette recommandation du général Delestraint, c'est d'abord ce qu'il ne dit pas. Il ne dit ni " en qui ", ni " en quoi " avoir confiance. A ses yeux, le plus impor...
https://www.facebook.com/notes/chef-d%C3%A9tat-major-des-arm%C3%A9es/confiance/1548451188570705/
Page Facebook officielle du chef d’état-major des armées Pierre de Villiers
Le député des Alpes-Maritimes Eric Ciotti, a apporté son "soutien total" au chef des Armées. "Toucher à la Défense, c'est remettre en cause notre souveraineté !", a-t-il déclaré sur Twitter.
"Les conséquences de l'austérité sur l'Armée sont intolérables. Le "coup de gueule" du Général de Villiers est légitime", a défendu dans un tweet le député La France insoumise de Seine-Saint-Denis Alexis Corbière.
Les conséquences de l'austérité sur l'Armée sont intolérables. Le "coup de gueule" du Gal de Villiers est légitime https://t.co/1PYt8ZrjPn
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